dimanche 12 mars 2023

Arte : documentaire sur la carte postale pendant la Grande Guerre

Un court et très instructif documentaire de 18 minutes sur la carte postale pendant la Première Guerre Mondiale, où est bien mise en relief son importance stratégique et psychologique pour les couples séparés, et les familles, mais aussi pour l'État en guerre : soutenir le moral des troupes.

Ce documentaire fait partie de la série Faire l'histoire sur Arte, qui passe l'histoire au prisme des objets, et consacre un épisode à : La carte postale, héroïne de guerre

racontée et présentée par Clémentine Vidal-Naquet, historienne.

Le documentaire est accessible en français, en allemand, et en français sous-titré anglais et espagnol. Il est disponible sur la chaîne franco-allemande en replay jusqu'à octobre 2024.

Dans la frénésie d'échanges qui prévalait (les chiffres donnent le vertige), on apprend que les couples pouvaient s'écrire une carte postale et une lettre à la fois, également parce que les cartes postales avaient plus de chances de parvenir et de n'être pas censurées.  

La production explose : cartes patriotiques, mais aussi cartes tendres rappelant le foyer, ou encore cartes licencieuses, pour pallier l'éloignement. Il est intéressant de noter que ces cartes ne sont qu'une représentation très atténuée des horreurs du conflit, et une mise en scène un peu mièvre qui n'est pas destinée à montrer la réalité et la cruauté du vécu quotidien des soldats, elles constituent avant tout une soupape, une échappatoire, une illusion de continuation de la vie d'avant où on évoque les sujets de tous les jours et où on discute des décisions à prendre pour la vie de la maison, un peu comme on le ferait autour d'une table.

Le tout bénéficie de la franchise postale, le poilu pouvant recevoir et envoyer du courrier dispensé d'affranchissement.


Quand j'ai commencé ce blog, j'étais loin de me douter que je tomberais sur autant de sources en lien avec la carte postale, et je suis toujours aussi surprise de constater à quel point elle a inspiré tant de créations, d'analyses, dans des champs extrêmement variés : histoire, littérature, essais, sociologie, etc. on la retrouve partout !

A propos des cartes sur la Grande Guerre et la période un peu antérieure, j'en avais présenté quelques unes ici, trouvées chez des vendeurs de cartes anciennes dans des boutiques tout aussi anciennes, situées dans les passages des 2ème et 9ème arrondissements. J'avais censuré, je crois, une d'entre elles qui montrait un chien pissant sur un casque à pointe, mais pourquoi ne pas la mettre, elle a sa place dans l'histoire, aujourd'hui où les relations sont apaisées. Le documentaire éclaire bien le sens de cette iconographie, d'ailleurs.

 

samedi 4 mars 2023

Le timbre, une révolution postale

 Sur le site du magazine L'Histoire, un article-interview de Sébastien Richez, spécialiste d'histoire postale :

Le timbre, une révolution postale.

La suppression du timbre rouge (prioritaire) aura suscité une avalanche d'articles, et beaucoup de larmes de crocodile. C'est intéressant d'avoir aussi un point de vue d’historien.

 

"En 2022, 7 milliards de plis ont été distribués dans l’année. Les prospectivistes estiment qu’à la fin de la décennie il n’y aura plus que 3 milliards de lettres échangées annuellement en France. C’est le même nombre de plis qu’en 1913"


"Dans les grandes villes, au début du XXe siècle, il y a entre deux et quatre distributions de courrier par jour en fonction de leur typologie. A Paris on compte même jusqu’à onze tournées journalières : trois pour les lettres, deux pour les cartes postales, deux pour la presse (matin et soir), deux pour les courriers d’affaires et encore pour les échantillons."

 

Deux autres articles intéressants du même auteur :


Le facteur rural en France avant 1914

Où l'on apprend que le facteur rural à une époque effectuait sa tournée sept jours sur sept, dimanche compris, des tournées extrêmement longues, jusqu'à 32 kilomètres par jour voire plus (en 1865, 2 684 tournées dépassaient les 28 km; en 1887, il y en avait 9 789), et avait droit à douze jours de congés par an. Il était souvent nourri (et abreuvé) par l'habitant. S'il devait être absent, sa paie était transférée à son remplaçant.

Il n'obtient que tard une Indemnité de chaussures, maigre, et longtemps la bicyclette est considérée comme saugrenue. Les premiers cyclistes voient le jour vers 1890, après vingt ans d’hésitations postales, et encore, est-ce aux frais de l'agent, l’administration faisant mine de tolérer cette pratique. J'avais lu ailleurs que l'uniforme lui aussi venait d'une initiative des agents, et qu'ils se le procuraient sur leurs propres fonds au départ.

L'auteur parle de "sacerdoce postal", de "soutane postale", tant le métier est contraignant et qui plus est, très mal payé en comparaison avec d'autres métiers comme ouvrier qualifié ou terrassier.

Cet article est une mine de renseignements sur une époque.

et aussi :

Postiers et facteurs en France depuis deux siècles.