lundi 24 avril 2023

Semeuse ! De cartes postales, de livres, et pourquoi pas de graines...

 Il y a le postcrossing, le bookcrossing, et... le seed bombing. Bien que cette activité ne soit pas reliée immédiatement aux deux premières; je ne peux pas m'empêcher de faire un lien.


Laisser des graines à Mère Nature, quelque part, et espérer qu'elles germent, qu'elles deviennent une plante, une fleur, une herbe fine, un légume, peut-être même un arbuste ou un arbre...

Cela fait longtemps que j'en avais entendu parler, et cette année, je m'y mets. 

J'avais l'impression que ça allait être compliqué, salissant, chronophage. En fait c'est juste chronophage (un peu). Il faut s'organiser.

Le seed bombing consiste à lancer des petites boules de graines un peu partout : une friche, un trou dans un mur, un endroit qui parait un peu abandonné, un bord de chemin, un terrain vague, une jardinière délaissée, le pied d'un arbre, un rond-point tristounet, un endroit difficile d'accès (la boule peut se lancer de loin).

 

Alors, comment fait-on ?

Ca se prépare très simplement, avec de l'argile, du terreau, de l'eau, une bassine ou un saladier, et des graines. Il vaut mieux mettre des gants parce que l'argile colle vraiment aux doigts.

On commence par déposer de l’argile dans la bassine, on mouille un peu, on malaxe, puis on ajoute du terreau et on malaxe encore, au besoin en ajoutant un peu d'eau de nouveau, l'ensemble doit être malléable mais pas trop liquide (sinon, ajouter de la terre). Argile et terreau sont utilisés en quantités à peu près égales (certains disent un peu plus de terreau que d'argile), on forme une boule. Avec le pouce on creuse un trou dans cette boule pour lui insérer quelques graines, et on referme la boule.

A ce sujet, tout dépend aussi de la forme des graines, je pense que les graines rondes et/ou bien dures peuvent être directement ajoutées dans le mélange des terres destiné à former des boules. Par contre certaines graines sont plus fragiles d'aspect, elles sont oblongues, et il vaut mieux éviter de les pétrir et les ajouter plutôt dans la boule déjà formée.

La boule doit sécher au moins 24 heures (je dirais plutôt 48 heures, elles deviennent bien dures et solides et ne risquent pas de s’effriter ou se briser en étant jetées de loin parfois). Je les fais sécher à plat, dans la baignoire, et posées sur une plaque de cuisson recouverte de papier sulfurisé ou au fond d'une bassine (mais chacun fait comme il veut). Dans les petits espaces, cela peut vite être assez invasif, c'est pourquoi il faut bien s'organiser, prévoir quand on sort les boules et être disponible à J+2 après leur création, etc. Également, si on tarde trop, elles risquent de commencer à germer, et ensuite en les lançant, on va abimer les germes. 

De ma toute petite expérience, certains germes apparaissent très vite, d'autres sont très lents, donc là aussi un peu de recul et d'habitude sont nécessaires.

Avril et mai sont les mois les plus adaptés pour cette activité, on peut aller jusqu'à juin s'il ne fait pas trop chaud (il est préférable en effet qu'il pleuve dans les jours qui suivent).. Ensuite d'autres plantations peuvent être faites de nouveau en automne, qui pousseront au printemps suivant, mais je ne me suis pas encore penchée sur la question.

Enfermées dans leur gangue d’argile et de terre, elles sont protégées des oiseaux, qui ne devraient pas pouvoir les dévorer avant leur germination.

C'est une chouette activité, qui peut être faite avec des enfants, pour les initier au jardinage un peu différent. C'est une activité pour urbains sans jardin, mais aussi pour tout le monde, un muret, un endroit difficile d'accès : hop, une boule de graines.

Je fais même l'essai d'en déposer dans des pots de fleurs au bord de mes fenêtres, elles viendront ainsi étoffer des plantations qui se sont dégarnies et elles pourront raciner dans la terre du pot en créant dans de petits endroits un mix de fleurs qui pourrait être sympa (si ça pousse !). Cela me permet aussi de tester si ces petites bombes de graines poussent bien car celles que je laisse ailleurs, je n'aurai pas forcément toujours la possibilité de savoir si elles ont poussé, je vais en laisser parfois loin de chez moi !

J'achète l'argile sur internet, celle que je prends est l'argile verte concassée Cattier vendue par sacs de 3 kilos, c'est une argile pour se faire des masques au départ. mais on peut utiliser toutes les argiles : blanche, rouge ou verte. L'argile qui sert à faire de la pâte à modeler peut aussi être utilisée. L'argile concassée fond très rapidement au contact de l'eau pour former une pâte.

 Pour le terreau, c'est un terreau classique. Certains mettent aussi de l'engrais mais j'avoue que par peur de mal doser, je n'en ai pas mis pour le moment. J'ai toutefois un engrais fait de fientes de poules qui pourrait bien se mélanger au substrat sans risquer de polluer ou de brûler la plante. Il ne faut pas oublier que ces boules sont jetées dans des milieux parfois hostiles, où la terre est pauvre, et que leur donner une bonne nourriture au départ augmente leurs chances de pousser. 

Il y a des endroits protégés où il ne faut pas jeter ces boules, comme les parcs naturels et tous les lieux où poussent des plantes protégées et particulières aux lieux.

Ces questions sont moins sensibles en ville. 

Il faut aussi éviter les plantes invasives, venues d'ailleurs et qui se sont souvent déjà développées dans nos contrées au détriment de la flore locale.

Ces plantations ont pour but de favoriser la biodiversité, attirer les insectes utiles, les papillons, les oiseaux, et bien sûr, pour l'agrément des humains. Elles peuvent aussi contribuer à améliorer les sols, tant leur qualité, qu'en les fixant et en participant à la lutte contre l'érosion.

Beaucoup de ces plantes se ressèmeront, aussi faut-il éviter les graines hybrides ou encore avec celles portant l'intitulé l'intitulé F1, qui sont des graines stériles (c'est écrit sur le paquet).

Quelques idées de graines (liste non exhaustive) :

Bien sûr chacune a ses besoins, certaines pour l'ombre, d'autres pour le soleil, il faut aussi tenir compte du climat local, on ne plantera pas la même chose en Angleterre ou en Norvège et dans le sud de l'Espagne.... A voir d'ailleurs si des cactées ne peuvent être semées par ce moyen dans les régions chaudes.

ciboulette (qui donne de jolies fleurs)

bleuets

coquelicots

cosmos

soucis

tournesols

nigelle

sauges (dont la sauge des prés)

pavots

plusieurs sortes de trèfles

moutarde

mélanges spéciaux rassemblant plusieurs plantes (mélanges de fleurs mellifères, mélanges spéciaux zones d'ombre, mélanges pour jachère, mélanges pied de mur, mélanges de plantes grimpantes,...)

chardons (qui attirent le chardonneret)

valériane (zones humides)

aneth

ipomée

oeillets d'Inde

bourrache

ail des ours

rose trémière

hostas (zones d'ombre)

capucines

pois de senteur

digitale pourpre

ancolie

...

Au niveau des légumes, je n'ai retenu que des pois d'une variété naine (Kokopelli) parce que je trouve leur port joli. Mais rien n'interdit de faire des boules de graines de tomates ou autres, sachant toutefois que ce type de plantation va avoir besoin d'eau régulièrement pour donner des fruits ou des légumes.

Dans les derniers essais faits, j'ai mis 6 boules de graines dans les alvéoles d'une boîte d’œufs en carton (en enlevant le couvercle). Les racines des plantes sont réputées pousser très facilement à travers la boîte et la boîte est biodégradable (choisir les boîtes de couleur neutre pour éviter des transferts de couleurs dans la terre). Cette présentation permet de créer un petit massif, elle peut être utilisée dans son propre jardin, ou dans tout lieu où il n'est pas nécessaire de jeter les boules à distance. 

Parmi les boules que j'ai posées directement dans mes pots de fleurs, certaines commencent à germer ! Elles bénéficient d'un arrosage régulier, et lorsque les plantes auront bien poussé, je ferai des apports de terre à la surface du pot. Également, j'éliminerai une partie des germes s'ils sont trop nombreux pour n'en conserver que les plus vigoureux. Évidemment, ce travail de jardinier ne peut être fait lorsqu'on laisse les boules dans la nature, donc le résultat y sera peut-être différent.

 

Une pratique ancienne, qui a connu un regain ces dernières années

Le seed bombing a connu un regain ces dernières années, en lien avec le guerilla gardening dont il est un des aspects (activisme vert), on le fait remonter généralement au début des années 70 à New York.

Mais des peuples confrontés à des terres pauvres, des climats difficiles, ont semble t-il depuis toujours utilisé la technique des boules de graines pour semer notamment dans les anfractuosités des murs ou des endroits plus difficiles d'accès.

Il me semble que si j'avais un jardin, j'adorerais aussi y lancer ces petites boules de graines pour voir ce qui en sort un peu plus tard. 

A propos de leur taille, elle est généralement d'un diamètre allant de 10 à 80 millimètres. Il ne faut pas mettre trop de graines dans chacune, elles se feraient concurrence et risqueraient de dépérir. A titre d’exemple, dans des boules de taille moyenne, j'ai mis de 2 à 3 graines de tournesol dans chacune, ce qui est déjà sans doute trop, je manque encore de recul. Avec un paquet, selon les variétés, on peut créer environ 12 boules de taille respectable (plus évidemment avec de toutes petites boules, mais cela réduirait l'apport en terre). J'ai aussi fait des mélanges de deux espèces différents, soit 2 paquets de graines, et du coup, c'est presque 25 boules.  On conseille aussi de jeter des boules pas trop loin les unes des autres, au cas où l'une ne donnerait rien.

J'espère revenir avec des bonnes nouvelles de toutes mes plantations en cours et à venir, c'est du boulot parce qu'il va falloir suivre, et revenir régulièrement voir se qui se passe. 

Le coin où j'habite est plutôt vert, avec beaucoup d'initiatives de plantations qui ont vu le jour ces dernières années, au pied des arbres, dans des bacs de plantes et de fleurs déposés par les habitants dans les petites rues piétonnes devant les maisons (et même dans les rues plus grandes), les jardins partagés, etc. Nous ne sommes plus, et c'est heureux, à l'époque des tristounets géraniums uniformes, les gens rivalisent d'ingéniosité et d'originalité (mais aussi d'utilité) dans leur choix de plantes, faisant du printemps un moment particulièrement attendu.

billet du 24 avril et mise à jour le 1er mai 2023

14 mai 2023

Je suis repassée à un endroit où j'ai mis ces petites boules, et hourra youpiii ça marche, ça germe. Si tout va bien, à cet endroit là, de merveilleux tournesols devraient voir le jour.

Ce sont des bacs de plantes entreposés directement dans la rue, certains semblent en déshérence, d'autres ont des plantes qui sont là depuis longtemps, aussi je ne sais pas si c'est entretenu.

D'autres bacs, près de restaurants, reçoivent régulièrement des mégots, dans une petite rue, c'est une bouteille de bière que j'ai trouvée dans le bac à côté de la boule de graines... Donc bon il va falloir être vigilant et faire du ménage si les riverains immédiats ne le font pas... 

J'ai choisi des bacs (bacs mis directement dans la rue) qui sont régulièrement très bien entretenus et où les habitants font déjà pousser quelque chose avec de l'arrosage régulier pour mettre des boules comportant des graines de cosmos, qui ont besoin d'eau (une plante aux fleurs superbes mais plutôt à réserver pour un usage domestique alors). C'est la limite du seedbombing, j'en suis consciente, les plantes gourmandes en eau ne sont pas adaptées, et les sècheresses qui se multiplient ne vont rien arranger.

Il y a eu beaucoup d'autres choses, mais parfois je ne peux pas voir ce qu'il advient, parce que je n'ai pas un accès immédiat au lieu, il faudra que la plante ait suffisamment poussé pour qu'elle soit visible. Mais j'ai semé en bien des endroits, et il m'en reste encore un bon paquet (de bons paquets, de graines)... Je découvre tout le temps de nouveaux endroits possibles... La ville a besoin de graines, de fleurs, qui sont là non seulement pour l'agrément de nos yeux mais pour s'intégrer dans toute une chaîne du vivant, alors semons, semons...

Mise à jour le 23 juin 2023

J'aurais bien aimé revenir avec des photos d'abondance, de récolte (non, pas de récolte !), de germination, de tiges hérissées et bien sûr de fleurs, ce ne sera pas le cas. Je ne suis pas revenue partout pour tout vérifier en détails non plus, certains endroits sont trop difficiles d'accès ou bien comportent déjà des végétaux, et c'est difficile de distinguer... 

J'ai le souvenir d'avoir mis des graines dans mes propres pots il y a quelques années, qui ont commencé à donner des résultats deux ans après, je me souviens d'une bourrache en particulier.

Pour le moment, les résultats sont assez maigres, il faut bien en convenir. Mais ça me donne l'occasion de tirer des leçons de l'expérience, et de penser à réajuster quelques petits trucs, ceux sur lesquels je peux avoir une influence, en tous cas.

A partir du 16 mai et jusqu'à tout récemment (je dirais jusqu'à la semaine dernière), il n'y a pas eu une goutte de pluie sur Paris. Depuis il y a eu des pluies parfois violentes mais brèves, des pluies d'orage, et nous repartons pour encore de la chaleur (quelle plaie).

Voilà qui donne l'occasion de toucher du doigt la nature aléatoire de l'activité, et aussi de se convaincre que quelque chose ne tourne plus rond dans notre climat (même si on nous dit de ne pas confondre climat et météo, nous sommes nombreux à voir qu'un printemps aussi chaud est quelque chose de tout à fait anormal, qui relève de la nouvelle normalité plutôt).

Quand on regarde les paquets de graines vendus pour être semés au printemps, tous donnent pour indication d'effectuer le semis entre avril et mai (pointe d'activité) ou entre mars et juin. Dans la réalité des conditions climatiques actuelles, je crois qu'il faut s'y mettre dès le mois de mars, et arrêter vers la mi-avril, pour espérer que les boules de graines bénéficient d'un peu d'eau dans les semaines qui suivent, c'est le moment crucial.

Le risque à éviter, c'est les gelées tardives, qui peuvent survenir jusqu'à avril en général.

Ce que je ferai l'année prochaine : m'y mettre beaucoup plus tôt, et arrêter beaucoup plus tôt aussi.

Celles de boules qui ont été posées dans mes pots de fleurs (là où il y a déjà une plante) poussent, même si c'est lent. Elles sont arrosées régulièrement.

Après avoir changé cela, il y a une deuxième chose à faire peut-être :

Dans tous les conseils que j'ai lus sur les seed bombs, ce n'est jamais dit, pourtant c'est un conseil qui est habituellement donné en matière de semis. Il est conseillé de faire tremper les graines 24 heures dans de l'eau avant de les semer, pour favoriser la germination. 

 

Une nouvelle série de graines sera lancée à l'automne, dans ce cas il s'agira de graines qui devront passer l'hiver dans leur gangue protectrice pour (peut-être) germer au printemps. Là aussi il faudra espérer l'aide des éléments, un hiver pas trop froid, ni trop doux qui pourrait faire germer les graines trop tôt...

Et puis une reprise au printemps, voire dès la fin de l'hiver, dès début mars. 

Certaines graines seront évitées, je pense en particulier aux cosmos qui sont très difficiles, et réclament beaucoup d'eau pour germer. Un essai sur une jardinière de rue, que j'arrose pourtant abondamment (parce qu'elle est facile d'accès et proche de chez moi) donne des résultats très maigres. Il faut peut-être considérer que certains végétaux ne sont plus adaptés au climat parisien, où on n'a jamais vu autant d'espèces des pays chauds pousser.

Dans un supermarché proche, les employés ont eu l'idée d'agrémenter le rayon légumes, qui est situé dans un sas en extérieur (plus exactement, dans une sorte de terrasse vitrée mais ouverte toute la journée puisque les clients entrent et sortent par là), de plantations de fruitiers. C'est ainsi qu'un superbe abricotier pousse et donne abondance de fruits. Voir pousser des abricots à Paris, ravissement ou inquiétude, je ne sais. Surprise en tous cas. Je précise que le grand pot qui contient cet arbre est là toute l'année, il ne sort pas de chez un pépiniériste depuis quelques semaines.

Il existe bien la fameuse tradition des pêchers de Montreuil, mais justement ceux-ci ont pu pousser grâce à des soins particuliers, protégés par des murs, comme l'a été et l'est toujours le potager du roi, à Versailles, par exemple.


lundi 17 avril 2023

et l'Afghanistan ?

 Un article évoque la situation pour le moins bizarre (mais pas si étrange) de la poste afghane sous le régime des Talibans, qui peut émettre des timbres, mais ne peut pas les vendre pour affranchir des courriers pour le moment...

la poste afghane dans Timbres magazine, article dont la teneur surréaliste est relayée par Pierre Jullien sur son blog.

Cela me remémore un excellent et très émouvant article paru il y a plusieurs années dans la revue XXI, "le facteur de Kaboul", où le fonctionnaire accomplissait chaque jour des petits miracles en distribuant du courrier dans des rues bombardées, sans numéro, et parfois sans adresse précise... Un travail quotidien de limier, une véritable enquête pour retrouver le destinataire.


Il y a eu aussi dans la presse nationale plus récemment, forcément, des articles sur les petits miracles réalisés aussi par la poste ukrainienne, et comment on a redécouvert combien elle était importante en temps de guerre : lettres, paquets, argent, elle reste un lien et est très aimée. 

 

La poste ukrainienne, ligne de vie dans un pays en guerre

"Le timbre, redevenu très prisé dans un pays privé d’électricité et d’Internet, s’est transformé en symbole de résistance. Dans des territoires libérés, M. Smelyansky les signe et les distribue comme des autographes. Chaque sortie est guettée avec autant de ferveur qu’une superproduction hollywoodienne. « Acheter un timbre, c’est à la fois acheter un morceau d’histoire, rendre hommage à l’armée et l’aider, puisque tous les profits lui sont reversés », observe le patron d’Ukrposhta (...)."

Guerre en Ukraine : des colis qui racontent le conflit

Dans l'article de Timbre Magazine évoqué plus haut, on apprend aussi qu'une oeuvre de Banksy fait l'objet d'un timbre en Ukraine, sorti en février dernier.